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Allocution prononcée au nom du CATRED et du GISTI le 8 mai 2009

lors de la manifestation sur le parvis des droits de l’Homme

Chers amis,

Au lendemain des différentes indépendances des anciennes colonies et protectorats, la France a décidé de geler sa dette envers ses anciens administrés qui l’avaient pourtant servie, dans ses armées et son administration, beaucoup au prix de leur vie. Par dépit à l’égard de ceux qui avaient choisi l’indépendance, les montants versés au titre des diverses pensions et retraites ne seront plus réévalués et l’inflation alors importante les réduira au fil des années à des valeurs dérisoires. C’est ce qu’on appelle la cristallisation. Les quelques réévaluations effectuées par la suite ne furent que symboliques.

Des plaintes engagées en 1985 devant le comité des droits de l’homme des Nations Unies aboutirent à la condamnation de la France. Mais ce comité n’ayant pas de pouvoir de contrainte la France s’en moqua. Il faudra attendre 2001 et l’arrêt du Conseil d’État en faveur de l’ancien sergent chef sénégalais, Diop pour que quelque chose commence à bouger. Se fondant sur la convention européenne des droits de l’homme cette haute juridiction reconnaît enfin une discrimination condamnable entre ses nationaux et ses anciens colonisés. La pension qui revient à ces derniers fait partie de leur patrimoine. Les priver de sa plus grande partie est une spoliation. En termes crus il s’agit d’un vol.

Vous connaissez la suite. Le gouvernement, n’entend pas du tout faire une application générale de cet arrêt. Pour le rendre inopérant il prépare un contre-feu. Ce sera la loi de finances pour 2002 qui institue une revalorisation en trompe l’œil fondée, non plus sur la nationalité mais sur une prétendue parité des pouvoirs d’achat obtenue au terme d’un calcul fort compliqué.

En réalité la revalorisation obtenue sera au maximum de 20%. Mais 20% de pas grand chose cela fait toujours pas grand chose. Certes on ne parle plus de nationalité, terme prohibé. La différence de traitement sera désormais fondée sur la résidence. Mais personne n’est dupe. La discrimination par la nationalité est bien maintenue puisque les nationaux français où qu’ils résident ne sont pas touchés par ces dispositions.

Le GISTI avec le CATRED et l’ATMF introduit alors un recours au Conseil d’État pour faire annuler les décrets d’application de cette loi. Mais par un revirement de cette juridiction le recours en annulation est rejeté en juillet 2006 de même qu’un recours individuel connu sous le titre d’arrêt KA. Le Conseil d’État décide de fermer les yeux devant le subterfuge du gouvernement et considère, contre toute évidence, que ce dernier a mis un terme à la discrimination.

Mais le même été le film « Indigènes » va susciter un tel émoi en France que le gouvernement se sent contraint de faire un geste, reconnaissant du même coup qu’il pratique bien la discrimination. Il décide pour 2007 d’aligner la retraite du combattant ainsi que les pensions d’invalidité sur celles perçues par les nationaux français. Mais là encore l’État va tricher. Il y met deux conditions : 1° pour obtenir son dû chaque bénéficiaire devra en faire la demande expresse ; et 2° il lui sera impossible de réclamer les arriérés.

Qui donc va avertir l’ancien combattant vivant dans un village perdu du Mali, du Viet-Nam ou même d’Algérie ? Mais de plus la France laisse de côté le plus grand nombre, ceux qui touchent une pension militaire ou civile, qu’elle soit directe ou de réversion ? S’ils vivent hors de France ils devront se contenter des maigres 20 % évoqués précédemment. Décidément derrière sa grandi­loquence et ses paroles exaltantes, la France cache une immense mesquinerie.

Ayant enfin pris conscience de cette spoliation, des partis politiques ont préparé une proposition de loi destinée à mettre un terme définitif à cette injustice. Les pensions militaires ou civiles, les pensions de réversion au bénéfice des veuves, doivent impérativement être alignées sur les taux pratiqués pour les nationaux français.

Il est grand temps que l’État abandonne cette mentalité coloniale qui continue de fonder sa politique, et depuis deux ans de façon encore plus scandaleuse. Il militarise ses banlieues contre bien souvent les descendants de ses libérateurs, qu’il stigmatise par les termes de sauvageons ou de racaille. Il pourchasse des étrangers qui sont souvent les enfants et les petits enfants de ses libérateurs. Il ruine des vies, détruit des familles pour le seul crime d’être sans papiers.

Mettre un terme à la spoliation mise en œuvre par la France à l’égard de ses anciens combattants et fonctionnaires est une condition indispensable pour qu’elle retrouve son honneur, mais elle ne pourra le retrouver pleinement qu’après une révision complète de sa honteuse politique d’immigration.

 

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